Ne retardons pas la sortie des mobylettes et scooters thermiques

Ne retardons pas la sortie des mobylettes et scooters thermiques


Cette carte blanche a initialement été publiée dans La Libre

Bien qu’ils représentent une faible part des véhicules qui circulent en Région bruxelloise (on en compte moins de 10,000), les mobylettes et les scooters thermiques (essence, diesel, gaz) sont une source significative de pollution de l’air.

En effet, une étude menée à Paris en 2019 montre que, par unité de carburant consommé, les scooters essence Euro 4 (première immatriculation en 2020 au plus tard) émettent trois fois plus d’oxydes d’azote (NOx) que les voitures essence Euro 6 (immatriculées en 2019 au plus tard). D’après les données du cabinet d’Alain Maron, les scooters émettent même six fois plus d’oxydes d’azote qu’une voiture particulière essence.

Le gouvernement bruxellois étudie actuellement l’option d’étendre l’autorisation des mobylettes et scooters de norme inférieure à Euro 5 jusqu’en 2027 (au lieu de 2024) et des Euro 5 jusqu’en 2029 (au lieu de 2027). Nous désapprouvons ce report et insistons sur l’importance de sortir du moteur thermique au plus vite.

La sortie des mobylettes et scooters de norme inférieure à Euro 5 est particulièrement importante dans la mesure où ces véhicules sont les plus polluants.
Les usagers actifs, en particulier, s’inquiètent de ce report de calendrier. En effet, les cyclistes partagent à Bruxelles de nombreuses infrastructures avec les cyclomoteurs : ils circulent sur la plupart des pistes cyclables ainsi que sur les zones avancées pour cyclistes aux carrefours à feux. Les piétons, étant à proximité ou partageant cet espace, sont confrontés aux mêmes problèmes. Cyclistes et piétons respirent donc directement les émissions polluantes émises par ces véhicules.

Nous demandons au gouvernement bruxellois de soutenir une interdiction des mobylettes et scooters de norme inférieure à Euro 5 avant 2027 et des Euro 5 avant 2029. Dans un même temps, nous souhaitons l’interdiction de la circulation en Région bruxelloise des scooters et mobylettes de norme inférieure à Euro 5 réimmatriculés à partir de 2024. Pour comparaison, la ville d’Amsterdam aux Pays-Bas n’autorisera plus, sauf exceptions, que les mobylettes et scooters électriques à partir de 2025.

Afin que cette transition ne prenne personne de court, nous insistons pour que le gouvernement bruxellois mette en place une communication large et claire au plus vite. Nous lui demandons également de créer un accompagnement financier pour les personnes qui en ont besoin, par exemple via une intégration des mobylettes et des scooters dans la prime Bruxell’air.

Bruxelles est la 8ème ville européenne la plus polluée au dioxyde d’azote (NO2). À cause de cette pollution, ainsi que des particules fines, 900 Bruxellois.es meurent prématurément chaque année. La pollution de l’air est également un gouffre financier. En 2018 elle a coûté 1,6 milliard d’euro à la région bruxelloise, soit 1 400€ en moyenne par Bruxellois pour cette seule année. Le trafic routier, dont les scooters et les mobylettes font partie, est responsable d’une grande partie de ce problème. Il émet ​29%​ des particules très fines (PM2.5) et représente 63% des émissions régionales d’oxydes d’azote (NOx). Les deux-roues motorisés sont également une source importante de pollution sonore.

Cette carte blanche a été signée par Pierre Dornier, Directeur, Les chercheurs d’air ; Florine Cuignet, Chargée de Politique bruxelloise, GRACQ – Les Cyclistes Quotidiens ; Thomas Deweer, Chargé de Politique bruxelloise, Fietsersbond ; Arne Robbe, Conseiller en politique piétonne, Walk ; &Anna Tinebra, Directrice, Tous à Pied.


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Mettons les enfants à la rue !

Mettons les enfants à la rue !


Cette carte blanche a initialement été publiée dans Le Soir

Derrière ce titre provocateur se cache une demande sérieuse et légitime. Il n’est pas question, bien évidemment, de priver les plus jeunes d’un toit. Non. Notre souhait est de voir les enfants, particulièrement les citadins, passer plus de temps dehors à marcher, courir, jouer ou, tout simplement, discuter. Nous entendons déjà les critiques : « Les rues ne sont pas pour les petits, elles sont dangereuses. » C’est vrai. Et c’est là tout le problème. Mais heureusement, il existe des solutions.

À vrai dire, le titre de cette tribune devrait être « Remettons les enfants à la rue ! » En effet, nos arrière-grands-parents, quand ils étaient enfants (au début des années 1900) pouvaient s’éloigner, seuls, de plusieurs kilomètres de leur domicile. Au fil des générations, cette distance a considérablement diminué. Aujourd’hui, un enfant qu’on laisse jouer au bout de la rue est une exception.

Pourquoi cette régression ? Au cours du XXe siècle, les voitures ont pris de plus en plus de place en ville. D’abord, car elles ont reçu une part croissante de l’espace public (au moins la moitié est dédiée au trafic routier aujourd’hui à Bruxelles). Et ensuite, parce que les véhicules que l’on voit sur la voie publique grossissent à vue d’œil (les fameux SUV entre autres).

Résultat : les enfants et les jeunes sont plus exposés aux collisions, que ce soit en tant que passager (dans la voiture donc) ou que piéton/cycliste. Chaque jour, en Belgique, 13 enfants sont impliqués dans un accident sur le chemin de l’école. En Région bruxelloise, c’est surtout en tant que piétons (60 %) qu’ils sont victimes d’un accident. Et si ces chiffres sont en baisse par rapport à quelques décennies en arrière, ce n’est pas parce que les rues sont devenues moins dangereuses, mais parce que les enfants sont moins autorisés à sortir, pour qu’ils ne se fassent pas renverser.

De nombreux impacts sur le bien-être

Cet accaparement de l’espace public par le trafic routier a de nombreux impacts sur le bien-être des enfants et des jeunes. Outre le risque d’accident dont on vient de parler, les enfants sont particulièrement vulnérables à la pollution de l’air en Belgique. Les enfants ont une capacité pulmonaire plus faible et un système immunitaire moins développé. Comme ils sont plus petits que les adultes, ils sont également plus proches du sol, où la pollution s’accumule. Etant donné que leur métabolisme est en construction, les polluants qu’ils absorbent ont des effets plus pernicieux et plus durables sur leur santé. Enfin, la pollution atmosphérique commence à nuire aux enfants avant même leur naissance.

Les moteurs, les klaxons et les pneus sur le bitume engendrent aussi de la pollution sonore. Ce bruit nuit à la concentration des enfants, et donc à leur apprentissage, et peut également provoquer des problèmes de santé, entre autres liés à l’audition.

Enfin, garder les enfants dedans (parce qu’il y a trop de voitures dehors) réduit leur activité physique, une situation qui, là encore, a des conséquences en termes de santé et de bien-être. En Belgique, un enfant sur cinq est en surpoids. Une augmentation des déplacements actifs, marcher pour aller à l’école par exemple, ainsi que plus d’espaces verts pour jouer, aiderait non seulement à lutter contre ce problème, mais également contre les difficultés psychomotrices, cardiaques ou encore respiratoires observées chez les jeunes qui ne bougent pas assez.

Créer des rues scolaires

Alors que faire ? En premier lieu, il est urgent de créer des rues scolaires piétonnes et végétalisées. Une rue scolaire est une rue (ou portion de rue) qui passe devant une école et qui est réservée à la marche, au vélo, au jeu et à la détente. Il n’en existe que très peu en Belgique. À Bruxelles, moins de 7 % des écoles maternelles et primaires en ont une. Et la grande majorité d’entre elles ne sont fermées au trafic routier que 30 minutes le matin, au moment de l’entrée des classes.

Cet aménagement a pourtant de nombreux avantages : moins de pollution de l’air et de bruit à l’école (où les enfants passent près de la moitié de l’année), moins de risques d’accident devant l’école, plus d’espace de jeu, d’échange et de détente (pour les écoliers mais aussi pour les parents, les enseignants et les riverains). De plus, la rue scolaire encourage les parents à ne pas déposer leurs enfants en voiture devant l’école et donc à les faire marcher plus souvent. Enfin, si elle est verdurisée, c’est-à-dire qu’on y plante des arbres, la rue scolaire protège aussi les enfants et les riverains des vagues de chaleur.

Des sondages réalisés récemment en France par Unicef et la Ligue nationale contre le cancer montrent respectivement que 84 % des parents qui utilisent surtout la voiture pour les trajets domicile-école aimeraient réduire cet usage, et que le même pourcentage de parents est favorable à la création de rues scolaires.

Réduire la taille des voitures

En parallèle, il est essentiel de réduire la taille des voitures et l’espace qui leur est réservé. En effet, dans un véhicule adapté à la ville (une petite citadine plutôt qu’un gros SUV), la visibilité est meilleure et le risque de collision avec un enfant est plus faible. De plus, moins d’espace pour les voitures veut dire plus d’espace pour les trottoirs, les pistes cyclables ou encore les lignes de bus et de tram, ce qui permettrait à plus d’enfants d’aller à l’école à pied ou à vélo.

Les enfants, comme les adultes, ont le droit de profiter de l’espace public en sécurité et de respirer un air sain. Nous demandons donc à nos élus d’accélérer la mise en place de mesures, comme les rues scolaires, en Belgique pour que nous puissions remettre nos enfants à la rue en toute quiétude.

Par Pierre Dornier, directeur de l’asbl Les chercheurs d’air; Christèle Devos, directrice générale d’Unicef Belgique


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Accélérons le développement des rues scolaires !

Accélérons le développement des rues scolaires !


Cette carte blanche a initialement été publiée dans Metropolitiques

En Europe, la pollution de l’air est à l’origine de 238 000 décès prématurés par an. Rien que dans la région de Bruxelles, les deux principaux polluants – le dioxyde d’azote et les particules fines – sont responsables de près de 930 décès prématurés chaque année.

L’exposition à la pollution de l’air, sur le court comme sur le long terme, est source de nombreux problèmes de santé. À chaque inspiration, des polluants pénètrent dans les voies respiratoires et les poumons. Plus leur taille est petite, plus ces polluants s’engouffrent profondément dans notre organisme et peuvent, par le sang, atteindre notre cerveau, notre cœur et bien d’autres organes. Leur présence entraîne des réactions telles que des inflammations, des irritations mais aussi d’autres pathologies bien plus graves : asthme, accidents vasculaires cérébraux, infarctus et cancers.

L’âge, l’environnement de vie et l’état de santé sont autant de facteurs d’exposition et de vulnérabilité à la pollution atmosphérique. Les enfants ont un organisme en plein développement et un rythme de respiration plus rapide que celui des adultes. Ils aspirent davantage de polluants et sont donc particulièrement vulnérables.

Depuis la crise sanitaire du Covid-19, les élu·es de plusieurs grandes villes européennes ont compris que la création de rues scolaires – ou rues aux écoles – permet de réduire l’exposition des enfants à la pollution de l’air. C’est le cas à Paris et surtout à Londres, où un quart des écoles se situent désormais dans une rue scolaire. Ce dispositif, qui a vu le jour en 1989 dans la ville de Bolzano en Italie, consiste à fermer des rues d’écoles au trafic motorisé, a minima aux heures d’entrée et de sortie des classes.

Alors que le nombre de pays mettant en œuvre des rues scolaires a doublé au cours des deux dernières années, l’association « Les Chercheurs d’air », dans laquelle je suis active, milite pour la création de nouvelles rues scolaires, à Bruxelles et ailleurs.

La lourde contribution à la pollution du trafic motorisé

Dans le monde, 4 millions de nouveaux cas d’asthme infantile par an seraient liés à la pollution émise par le trafic automobile. C’est un nouveau cas d’asthme sur quatre pour la Belgique et un nouveau cas d’asthme sur trois à Paris. Ces deux données illustrent l’impact de nos modes de transport sur la santé des plus jeunes et l’importance de limiter la pollution générée par le trafic routier.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a revu en 2021 ses lignes directrices relatives à la qualité de l’air, notamment les seuils maximums recommandés d’exposition à certains polluants. Les limites légales annuelles européennes pour les particules fines (PM2,5) et le dioxyde d’azote (NO2) sont respectivement cinq et quatre fois plus élevées que ces nouvelles recommandations.

Les États, les régions et les villes doivent agir dès maintenant en se référant aux seuils de l’OMS. Ils doivent prendre davantage de mesures ambitieuses pour protéger leur population, d’autant que les sources de certains polluants, comme le NO2, sont clairement identifiées et peuvent être combattues localement.

À Bruxelles, les deux principaux polluants présents dans l’air sont le dioxyde d’azote et les particules fines (PM). En 2019, le trafic motorisé était à l’origine de 60 % des émissions de NO2 et de 30 % des émissions de particules fines (PM10 et PM2.5). Ces pourcentages sont heureusement à la baisse, à la suite notamment de la mise en place d’une zone de basses émissions qui limite le type de véhicules pouvant circuler dans la capitale selon leur niveau d’émission de polluants. D’autres mesures, comme les rues scolaires, doivent également être déployées pour réduire de manière drastique l’impact du trafic routier sur la santé.

Mesurer la qualité de l’air dans les écoles

En 2020, Les Chercheurs d’air ont rejoint le « partenariat pour un air pur à Bruxelles» (Brussels Clean Air Partnership), créé par Bloomberg Philanthropies et le gouvernement de la Région Bruxelles-Capitale. L’objectif de ce partenariat était de « mettre en œuvre un large éventail de projets visant à soutenir une politique efficace de réduction de la pollution de l’air dans la ville ».

Dans ce cadre, notre association a lancé en 2020 la plus grande campagne collaborative de mesures de la pollution menée en Europe : #Leschercheursdair. C’est la première fois en Europe que les concentrations en NO2 étaient mesurées par des citoyen·nes sur autant de sites et sur une durée aussi longue (une année complète). L’objectif était notamment d’affiner la connaissance des niveaux de polluants dans les rues bruxelloises, dans une perspective de science participative.

Concrètement, nous avons fait appel aux dix-neuf communes de la Région bruxelloise et à leurs habitant·es, afin d’installer 134 dispositifs de mesure des concentrations en NO2. Les communes ont prioritairement installé ces dispositifs dans des lieux collectifs, dont soixante cours de récréation d’écoles maternelles et primaires. Les autres dispositifs de mesure ont été installés au domicile de citoyen·nes en s’assurant d’une bonne couverture du territoire bruxellois.

Les résultats de cette campagne sont clairs : les 134 sites de la capitale sont exposés à des concentrations moyennes annuelles de NO2 qui dépassent les recommandations de l’OMS (10 μg/m3 par an). Les cours de récréation des écoles ne sont pas épargnées, certaines étant exposées à des niveaux jusqu’à trois fois supérieurs à ces recommandations. C’est le cas des écoles Les Tournesols et La Nouvelle Vague, respectivement situées à Saint-Josse-ten-Noode et Molenbeek-Saint-Jean. Ces communes se situent dans le croissant pauvre de Bruxelles, soit la zone qui concentre les populations les moins favorisées sur le plan économique. Ce n’est pas la première fois que ce type de mesure est effectué au sein des écoles.

En 2018, l’ONG Greenpeace avait mené l’opération « Mon air, mon école », mesurant les concentrations en NO2 dans les classes, les cours de récréation et à l’entrée de plus de 222 écoles en Belgique. Les résultats alarmants avaient mené, à Bruxelles, à la création d’un mouvement de parents nommé « Filter Café Filtré », réclamant un air de qualité pour les enfants.

Les rues scolaires comme levier d’action

Un des lieux les plus fréquentés par les enfants est l’école, où ils passent plus de 200 jours par an en Belgique. Il est donc indispensable que l’école soit tenue à l’écart des effets néfastes du trafic motorisé. Pour cela, la rue scolaire est un dispositif efficace qui comporte plusieurs avantages.

D’abord, qui dit moins de trafic motorisé dit moins de pollution atmosphérique. Des mesures précises ont été effectuées à Londres dans plusieurs rues scolaires, financées par la fondation de la Fédération internationale automobile et à nouveau par Bloomberg Philanthropies. Les concentrations de NO2 lors de la fermeture de la rue le matin sont jusqu’à 23 % inférieures à celles mesurées en l’absence de rue scolaire.

Ensuite, les rues scolaires encouragent les déplacements actifs comme la marche ou le vélo. À Londres, les derniers cent mètres vers l’école n’étant plus accessibles en voiture, certains parents modifient leurs habitudes de déplacement et recourent moins à la voiture. Les effets sont tout aussi positifs pour la qualité de l’air qu’en matière d’activité physique pour les enfants et leurs parents.

En diminuant le trafic, les rues scolaires réduisent également les risques d’accidents de la route. Les déplacements vers l’école sont en effet à l’origine de la plupart des accidents de la route pour les enfants.

L’école est par ailleurs un lieu de socialisation très important pour les enfants, mais aussi pour leurs parents. Alors que les trottoirs devant les écoles sont souvent étroits, la rue scolaire, avec son espace piéton élargi, donne la possibilité aux enfants et aux parents de nouer davantage de discussions et de rencontres.

Ces rues scolaires sont généralement appréciées de la communauté scolaire. Plusieurs sondages menés en France auprès de parents d’élèves montrent que plus de 80 % des parents interrogés soutiennent la mise en place de ce dispositif, notamment pour améliorer la sécurité et la qualité de l’air devant l’école.

Quelles perspectives ?

En Belgique, les premières rues scolaires ont été mises en place à Gand en 2012. Elles ont fait leur apparition six ans plus tard dans le Code de la route belge.

À ce jour, la Région bruxelloise compte trente-neuf écoles maternelles et primaires situées dans une rue scolaire – soit moins de 7 % de ces établissements scolaires. Encourager et soutenir la mise en place de ces rues n’est pas une chose simple, chaque commune ayant sa majorité politique et ses propres procédures pour les créer. Peu de communes décident de les créer de leur propre initiative, restant, pour la plupart, en attente de demandes des parents d’élèves et de l’établissement scolaire.

S’il y a une demande et accord de la commune, un test est mené pour une durée de trois mois. La rue de l’école est alors libérée du trafic routier par une barrière amovible. Si le test est concluant, la commune procède à l’aménagement définitif de la rue, qui se traduit généralement simplement par l’achat d’une barrière fixe.

Le fonctionnement de la majorité des rues scolaires à Bruxelles nécessite une présence humaine pour ouvrir et fermer la barrière. Cette fonction est occupée par différents acteurs selon les communes, voire selon les écoles : parents bénévoles, éducateurs, professeurs, agents de prévention, etc. L’absence de personne disponible pour effectuer cette tâche ponctuelle entrave la multiplication des rues scolaires. Sans volonté politique de généralisation du dispositif, seuls les plus motivés y auront accès et les enfants continueront à subir les effets néfastes du trafic motorisé.

Pour éviter ces difficultés, certaines communes se distinguent en créant des rues piétonnes ou en transformant, plus localement, la chaussée en parvis d’école. De nouveaux dispositifs de fermeture sont, petit à petit, testés pour se passer de la présence humaine. Des bornes équipées de caméras ANPR (Automatic Number Plate Recognition) ont été, par exemple, mises en place dans deux rues scolaires de la Ville de Bruxelles.

Aux Chercheurs d’air nous soutenons ces municipalités ambitieuses et la création de rues scolaires permanentes, c’est-à-dire continûment fermées à la circulation. Les rues d’écoles doivent être aménagées de sorte que seuls les riverains et les services nécessaires puissent y accéder. Une simple barrière amovible ne suffit pas à transformer une rue d’école en un espace sécurisé et agréable pour les enfants et leurs parents. À l’image des rues aux écoles végétalisées et piétonnisées à Paris, les rues d’écoles doivent être à la fois identifiées comme telles et leur urbanisme repensé plus largement.

La plupart des élus sont toutefois encore frileux quand il s’agit de toucher à la place de la voiture en ville. Peu d’entre eux sont, par exemple, prêts à supprimer les places de stationnement devant ou à proximité de l’entrée des établissements scolaires, à élargir les trottoirs et parfois même à sécuriser les traversées piétonnes.

Récemment, plusieurs élu·es et partis politiques ont ainsi décidé de revoir à la baisse ou de geler les plans de circulation élaborés dans le cadre du plan régional de mobilité bruxellois, à la suite de mouvements d’opposition pro-voiture.

En partenariat avec d’autres associations, nous travaillons d’arrache-pied aux Chercheurs d’air pour multiplier le nombre de rues scolaires dans les dix-neuf communes bruxelloises. À Bruxelles comme ailleurs, les élu·es locaux doivent davantage prendre la mesure de cet enjeu majeur de santé publique.

Pour en savoir plus :


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Vendredi noir pour nos poumons

Vendredi noir pour nos poumons

Aujourd’hui, c’est Black Friday. Des milliers de Belges vont acheter des millions de choses, plus ou moins utiles, à prix plus ou moins réduit. L’écrasante majorité de ces acquisitions sera livrée à domicile par des camionnettes diesel, sources de pollution, de congestion et, parfois, d’accidents. Que pouvons-nous faire pour répondre à ce problème qui grossit d’année en année ?

Cette carte blanche a initialement été publiée dans Le Soir.

Le shopping électronique occupe de plus en plus de place dans nos vies. La part des Belges qui achètent depuis leur écran est passée de 45% à 85% entre 2011 et 2021. Avec un pic lors du Black Friday, journée qui détient le record, chaque année, du nombre de paiements numériques en Belgique. En 24 heures, nous transférons des dizaines de millions d’euros vers les comptes en banque de vendeurs en ligne, le plus souvent des géants de l’e-commerce. Pour rappel, c’est lors du Black Friday 2017 que Jeff Bezos, fondateur d’Amazon, est devenu, pour un temps, l’homme le plus riche de la planète.

Le Black Friday encourage la surconsommation et le gaspillage, enrichi de très grosses entreprises aux dépens des commerces locaux, presse les chauffeurs-livreurs comme des citrons. La plupart de ces achats en ligne seront déposés devant chez nous, multipliant ainsi le nombre de camionnettes dans nos rues. En quoi est-ce problématique ?

Tout d’abord, presque toutes ces camionnettes de livraison roulent au diesel et participent ainsi fortement à polluer l’air que nous respirons. À Bruxelles, les camions et les camionnettes sont responsables de 31 % des émissions de NOx et 33% des émissions de particules fines du trafic routier. Cette pollution coûte 50 000 € par jour aux Bruxellois.es, essentiellement en frais de santé car elle occasionne de nombreux problèmes de santé, parfois très graves, comme de l’asthme, des AVC ou encore des cancers.

Les camionnettes thermiques sont également émettrices de grandes quantités de CO2 et sont sources d’une importante pollution sonore. De plus, même électriques, elles sont susceptibles de causer des bouchons et d’occasionner des accidents avec les cyclistes ou les piétons lorsqu’elles manoeuvrent et s’arrêtent en ville. Malheureusement, ce genre d’accident est en forte hausse en Belgique.

La première chose à faire pour limiter les impacts environnementaux du Black Friday à Bruxelles est de n’acheter que des articles dont vous avez réellement besoin.

Ensuite, chaque fois que l’option existe, demandez une livraison en point relais. La majorité des achats effectués pendant le Black Friday sont composés de produits petits et légers, comme des vêtements ou de l’électronique, et il y a un point relais à moins de 10 minutes à pied de chez vous. Y récupérer votre paquet (sans utiliser votre voiture) devrait donc être aisé.

Pour des colis plus gros ou plus lourds, la livraison à domicile par vélo cargo est une bonne solution. En effet, ce mode de transport rapide et silencieux n’émet ni pollution de l’air ni CO2. Et quand le vélo cargo n’est pas adapté, il faut privilégier la camionnette électrique à son équivalent thermique.

Enfin, il est essentiel de donner du temps aux achats pour qu’ils arrivent à destination, que ce soit en point relais ou à la maison. Si vous exigez que votre colis vous soit livré le lendemain, il y a de fortes chances pour que la camionnette qui le transporte roule partiellement à vide car son chargement n’aura pas eu le temps d’être optimisé.

Et si le choix de la livraison en point relais, par vélo cargo ou par camionnette électrique n’existe pas, comme c’est encore trop fréquemment le cas, nous devons l’exiger. Il n’est pas acceptable que les plateformes de livraisons en ligne, en plus de leurs pratiques sociales, économiques et environnementales souvent critiquables, ne nous donnent pas la possibilité d’opter pour des livraisons moins polluantes.

Signataires :

Pierre Dornier, Président, Les chercheurs d’air
Solène Sureau, Chercheuse, SONYA/IGEAT/ULB
Marie-Charlotte Debouche, Coordinatrice, Clean Cities Campaign
Thomas Deweer, Chargé de politique, Fietsersbond
Florine Cuignet, Chargée de politique bruxelloise, GRACQ
Frédérique Ortuno, Coordinatrice, Remorquable


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Il faut un plan plus ambitieux pour combattre la pollution de l'air à Bruxelles

Il faut un plan plus ambitieux pour combattre la pollution de l’air à Bruxelles

Cette carte blanche a initiallement été publiée dans Le Soir

Comme l’a montré une récente analyse de CE Delft, la zone de basses émissions (LEZ – Low Emission Zone) fait partie des outils les plus efficaces pour lutter contre la pollution de l’air à Bruxelles.

Pour rappel, cette mesure vise à réserver, petit à petit, les rues de la Région Bruxelloise aux moyens de transport les moins polluants. Par exemple, à partir du 1er janvier 2022 , les voitures diesel de plus de 11 ans ne pourront plus circuler sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale (RBC).

Malheureusement cette sortie du moteur thermique ne va pas assez vite. En effet, la région veut attendre jusqu’en 2030 pour se libérer complètement des véhicules diesels et 2035 pour les essences et gaz. Et encore, des exceptions seront faites pour certains poids lourds et les autocars qui pourront continuer à circuler après 2035.

Des effets directs sur la santé

Ce sont pourtant près de 1.000 personnes qui meurent prématurément chaque année à Bruxelles à cause de la pollution de l’air, dont une grande partie (63% pour le dioxyde d’azote et 29% pour les particules fines PM2.5) est émise par le trafic routier. Comme l’illustre la série de témoignages de Bruxellois.es récoltés par l’ASBL Les chercheurs d’air, la pollution de l’air peut avoir des effets très directs sur la santé : crises d’asthme (particulièrement chez les enfants), sinusites et bronchites chroniques. Certains accidents cardiovasculaires et cancers sont également liés à la mauvaise qualité de l’air.

Une pollution très coûteuse

La pollution de l’air coûte aussi très cher aux finances de la région. En 2018 ce coût s’est élevé à 1,6 milliard d’euros, soit près de 1.400 € par Bruxellois.e.

Un calendrier LEZ ambitieux permettrait de réduire fortement les concentrations en NO2 à Bruxelles à court terme, et ainsi de sauver des centaines de vies. Par exemple, à Madrid et à Londres, grâce à une sortie plus rapide du diesel et de l’essence, la pollution au NO2 a respectivement chuté jusqu’à 32% entre juin 2018 et juin 2019 et jusqu’à 44% entre février 2017 et janvier 2020. A Bruxelles, les effets de la LEZ sont bien moins impressionnants. Entre 2018 et 2019, les concentrations annuelles de NO2 ont diminué de 10% seulement en moyenne.

L’exemple montré par d’autres grandes villes

Il est important de préciser que la sortie du diesel d’ici 2025 et de l’essence d’ici 2030 est possible. Des villes bien plus grandes que Bruxelles s’y sont engagées et sont en bonne voie pour y parvenir. A Londres, à partir du 25 octobre 2021, seules les voitures diesel Euro 6 (immatriculées entre 2015 et 2019) seront autorisées sur une surface de plus de 850 km2, alors qu’à Bruxelles (160 km2), les Euro 5 (immatriculées entre 2011 et 2015) seront encore autorisées jusqu’en 2024. Autre exemple avec la Métropole du Grand Paris, qui s’étend sur une surface deux fois plus importante que la RBC et qui compte six fois plus d’habitant.e.s, tous les véhicules diesels seront interdits d’ici 2024 et tous les essences d’ici 2030, soit respectivement 6 et 5 ans avant Bruxelles. Enfin, à Amsterdam, dont la superficie et la population sont similaires à celle de Bruxelles, tous les véhicules motorisés devront être zéro-émission à partir de 2030.

Favoriser les alternatives

En Région Bruxelloise, des alternatives sérieuses aux véhicules thermiques individuels existent : la mobilité douce et/ou les transports publics et/ou les véhicules partagés permettent déjà de se rendre presque partout. Mais en étant encore plus soutenues et développées, ces alternatives pourraient devenir encore plus attractives.

Par exemple, en réduisant la part de l’espace public réservé aux voitures au profit des bus et trams, on pourrait augmenter la vitesse moyenne de ces derniers (16 km/h actuellement). Et plus de place pour la mobilité active permettrait d’accroître le nombre de déplacements à pied et à vélo car ces derniers seraient plus rapides et plus sécurisés.

En parallèle, les solutions de partage de voitures et utilitaires électriques doivent être soutenues afin de combler les vides laissés par le transport public.

Enfin, la prime Bruxell’air doit être renforcée pour s’assurer que les ménages les plus défavorisés puissent facilement trouver des alternatives si leur véhicule ne peut plus circuler. Il est cependant utile de rappeler que les ménages Bruxellois avec les revenus les plus faibles n’ont que rarement une voiture mais qu’ils sont en général plus durement impactés par la pollution de l’air. La mise en place d’une LEZ plus ambitieuse, avec des mesures d’accompagnement adéquates, n’est donc pas une mesure « anti-pauvres » comme on l’entend parfois, loin s’en faut.

Sur la base de ces éléments, la Région de Bruxelles-Capitale, et plus particulièrement le ministre Alain Maron, doit profiter de la révision actuelle du calendrier de la Zone Basse-Emission pour proposer une sortie du diesel en 2025 au plus tard et une sortie de l’essence et du gaz en 2030 au plus tard.

Waarom de lage-emissiezone in Brussel sneller invoeren?

Zoals blijkt uit een recente analyse van CE Delft is de lage-emissiezone (LEZ – Low Emission Zone) een van de meest doeltreffende instrumenten in de strijd tegen de luchtvervuiling in Brussel.

Die maatregel wil, zoals bekend, de straten van het Brussels Gewest geleidelijk aan voorbehouden voor de minst vervuilende vervoermiddelen. Zo zullen bijvoorbeeld vanaf 1 januari 2022 dieselauto’s van meer dan 11 jaar oud niet meer mogen rijden op het grondgebied van het Brussels Hoofdstedelijk Gewest (BHG).

Jammer genoeg duurt het veel te lang om af te stappen van de verbrandingsmotor. Het gewest wil immers wachten tot 2030 om zich volledig te bevrijden van dieselvoertuigen en tot 2035 van auto’s op benzine. En dan zullen er nog uitzonderingen mogelijk zijn voor bepaalde vrachtwagens en voor touringcars, die ook na 2035 mogen blijven rijden.

Nochtans sterven er in Brussel elk jaar bijna 1000 mensen voortijdig als gevolg van de luchtvervuiling, die voor een groot deel (63% van de stikstofdioxide en 29% van het fijnstof PM2.5) wordt veroorzaakt door het wegverkeer. Zoals blijkt uit de reeks getuigenissen van Brusselaars opgetekend door vzw De Luchtzoekers, kan de luchtvervuiling heel directe gevolgen hebben voor de gezondheid: astma-aanvallen (vooral bij kinderen), sinusitis en chronische bronchitis. Er is ook een verband tussen sommige beroertes en kankers en de slechte luchtkwaliteit. De luchtvervuiling vormt ook een zware financiële belasting voor het gewest. In 2018 bedroegen die kosten 1,6 miljard euro, of bijna 1 400€ per Brusselaar.

Een ambitieuze kalender voor het invoeren van de LEZ zou de NO2-concentraties in Brussel op korte termijn sterk kunnen verminderen, en zo dus honderden levens kunnen redden. In Madrid en Londen bijvoorbeeld daalde de NO2-vervuiling dankzij een sneller verbod op diesel en benzine met respectievelijk 32% tussen juni 2018 en juni 2019  en 44% tussen februari 2017 en januari 2020. In Brussel zijn de gevolgen van de LEZ heel wat minder indrukwekkend. Tussen 2018 en 2019 daalde de jaarlijkse NO2-concentratie met slechts gemiddeld 10%.

We willen er wel op wijzen dat de uitstap uit diesel tegen 2025 en uit benzine tegen 2030 mogelijk is. Steden die veel groter zijn dan Brussel, hebben zich daartoe verbonden en zijn goed op weg om te slagen. In Londen zullen vanaf 25 oktober 2021 bijvoorbeeld enkel nog Euro 6-dieselauto’s (ingeschreven tussen 2015 en 2019) worden toegelaten op een oppervlakte van 850 km2, terwijl in Brussel (160 km2) Euro 5-auto’s (ingeschreven tussen 2011 en 2015) nog zullen toegestaan zijn tot 2024. Een ander voorbeeld is de Parijse metropool, die zich uitstrekt over een oppervlakte die twee keer zo groot is als het BHG en die zes keer zoveel inwoners telt. Daar zullen alle dieselvoertuigen tegen 2024 verboden zijn en alle benzineauto’s tegen 2030 – dat wil zeggen respectievelijk 6 en 5 jaar eerder dan in Brussel. En ten slotte moeten in Amsterdam, met een gelijkaardige oppervlakte en bevolking als Brussel, alle gemotoriseerde voertuigen tegen 2030 een nuluitstoot hebben.

In het Brussels Gewest bestaan er ernstige alternatieven voor voertuigen met een verbrandingsmotor: via zachte mobiliteit en/of het openbaar vervoer en/of deelauto’s is het nu al mogelijk om bijna overal te komen. Maar die alternatieven zouden nog aantrekkelijker kunnen worden als ze nog verder zouden worden gesteund en ontwikkeld.

Door bijvoorbeeld het deel van de openbare ruimte dat is voorbehouden voor auto’s te beperken ten voordele van bussen en trams, zou de gemiddelde snelheid van die laatste (momenteel 16 km/uur) kunnen verhogen. En als er meer ruimte komt voor actieve mobiliteit, zou ook het aantal verplaatsingen te voet en met de fiets toenemen, omdat die dan sneller en veiliger zouden kunnen verlopen.

Daarnaast moet er steun komen voor oplossingen in de vorm van elektrische deelauto’s en -bestelwagens om de gaten in het openbaar vervoer te dichten.

En ten slotte moet ook de premie Bruxell’air worden versterkt, om ervoor te zorgen dat de meest kansarme gezinnen gemakkelijk alternatieven kunnen vinden als hun auto niet meer mag rijden. Al moeten we er wel aan herinneren dat de Brusselse gezinnen met de laagste inkomens slechts zelden een auto hebben, maar meestal wel harder worden getroffen door de luchtvervuiling. De invoering van een ambitieuzere LEZ, met de passende begeleidende maatregelen, is dus geen maatregel “tegen de armen” zoals soms te horen is, integendeel.

Op basis van die elementen moet het Brussels Hoofdstedelijk Gewest, en meer bepaald minister Alain Maron, de huidige herziening van de kalender van de lage-emissiezone aangrijpen om een uitstap uit diesel tegen uiterlijk 2025 en uit benzine en gas tegen uiterlijk 2030 voor te stellen.


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5 stratégies pour moins de pollution

Combattre le coronavirus c’est aussi combattre la pollution de l’air.

Et vice versa.

Cette carte blanche a d’abord été publiée par Le Soir

Les autorités à travers l’Europe se préparent à une levée progressive du confinement, une opportunité en or pour améliorer la mobilité urbaine de demain. Les décisions qui seront prises dans les semaines à venir ont le potentiel de rendre nos villes plus vertes, moins bruyantes et plus saines. Mais ces décisions doivent être ambitieuses. La récente baisse de la pollution de l’air deviendra sinon vite un lointain souvenir voilé par le retour des fumées toxiques. C’est malheureusement ce que l’on observe déjà en Chine, où les habitants préfèrent leur voiture aux transports publics. Ce risque est particulièrement inquiétant car il est probable que la pollution de l’air nous rende plus vulnérables au coronavirus. Lutter contre la pollution de l’air c’est lutter contre le coronavirus et les autres maladies respiratoires.

Les villes n’ont pas besoin de réinventer la roue pour que la pollution de l’air reste faible

Chaque crise contient une opportunité : des recherches montrent que nous changeons plus facilement nos habitudes de mobilité lorsque nous vivons des situations marquantes. C’est par exemple ce qui s’est passé en France en décembre 2019 lors des grèves qui ont converti grand nombre de citadins au vélo. La sortie du confinement va donc très certainement s’accompagner de nouvelles habitudes de déplacement. Beaucoup de villes à travers le monde l’ont bien compris et ont commencé à repenser leur espace pour donner toutes ses chance à une mobilité plus propre de se développer et de s’ancrer.

Heureusement, aucune ville n’aura besoin de réinventer la roue pour que les émissions de dioxyde d’azote restent faibles une fois le confinement terminé. Il existe une multitude d’exemples dont les villes peuvent s’inspirer. Certains remontent jusqu’aux chocs pétroliers des années 1970 lorsque les villes néerlandaises se sont lancées dans une refonte totale de leur mobilité, si bien qu’elles font désormais partie des villes les plus agréables du monde.

On relève au moins cinq stratégies dont il a été prouvé qu’elles permettent de lutter contre la pollution de l’air et le changement climatique, ainsi que de préparer un avenir zéro-émission comme fixé par le Green Deal Européen et déjà en cours d’adoption dans plusieurs grandes villes.

En luttant contre la pollution de l’air ces cinq stratégies permettent également de lutter contre le Coronavirus.

Cinq stratégies pour un air plus propre

Tout d’abord, le partage de l’espace urbain doit être repensé. Multiplier le nombre de pistes cyclables et élargir les trottoirs favorisera la mobilité active, et donc non polluante, tout en facilitant la “distanciation physique”. Comme l’a montré une étude réalisée par l’ANSES l’année dernière, réduire le trafic automobile est également indispensable à une baisse rapide de la pollution. Il faut donc aussi piétonniser le plus d’espace possible (rues, places, berges, etc.).

Cette première stratégie est suivie par exemple par la région bruxelloise qui est en train de transformer le centre-ville en zones résidentielles donnant la priorité aux piétons et aux cyclistes sur les voitures, et qui va mettre en place 40 km de pistes cyclables supplémentaires. La Région Ile de France va elle investir 300 millions d’Euros pour mettre en place un réseau de 680 km de pistes cyclables dont certaines devraient voir le jour très rapidement grâce à l’ “urbanisme tactique”. C’est aussi le cas à Berlin, qui a créé de nouvelles piste cyclables “pop-up”, à Cracovie, qui prévoit d’étendre son infrastructure cyclable et d’élargir les trottoirs, à Vilnius, qui va faire de son centre-ville un grand café à ciel ouvert, et à Bruxelles.Dublin a par ailleurs commencé à retirer provisoirement des places de stationnement pour accroître la sécurité des pistes cyclables et assurer une “distanciation physique”.

Deuxièmement, ces refontes de l’espace urbain fonctionneront uniquement si l’usage des transports publics, dont il a été prouvé qu’ils contribuent à lutter contre la pollution de l’air, est encouragé. C’est actuellement un grand défi car, la population évitant les espaces exigus, le secteur traverse une période difficile. A Londres, la baisse de fréquentation atteint 80 % pour les bus et jusqu’à 92 % pour le métro. En Allemagne, des experts en mobilité s’attendent à ce qu’il y ait, dans le pire des cas, une réduction de 50 % de l’utilisation des transports publics à l’horizon 2023. Tout doit être mis en place pour que ce rejet du transport public, quelque soit son intensité, ne débouche pas sur une augmentation de l’utilisation de la voiture individuelle.

Des mesures doivent être prises immédiatement, et certaines sont déjà déployées, pour que bus, trams et métros ne soient pas vecteur du virus : nettoyage en profondeur des véhicules, mise à disposition de désinfectant, marquage au sol et des sièges pour inciter à la distanciation. L’utilisation de tickets électroniques permettraient de réduire les points de contact physique et faciliteraient l’information des usagers en temps réel.

Ces arrangements temporaires devront être suivis d’améliorations durables pour encourager l’utilisation des transports en commun. La promiscuité qui caractérise certaines lignes est inacceptable et représente un danger pour la santé publique. Plus d’espace doit être donné aux utilisateurs en étoffant le réseau et en augmentant les fréquences. Aussi, de 16km/h actuellement, la vitesse des bus doit être augmentée grâce à des voies dédiées.

Afin de créer de nouveaux emplois et de lutter encore plus efficacement contre la pollution de l’air, il est également essentiel d’électrifier les flotte de bus. Cela rendra aussi ces derniers plus attrayants, comme le montre un rapport d’après lequel 93 % des usagers parisien pensent que la transition vers des modèles électriques montre que l’exploitant des bus se soucie de sa clientèle.

Troisièmement, les horaires des écoliers comme des travailleurs doivent être assouplis afin d’aplanir les heures de pointe et ainsi éviter que trop de monde ne prenne les transports en commun au même moment. Les nouvelles habitudes comme le télétravail doivent dans la mesure du possible être prolongées afin de réduire le besoin de se déplacer chaque jour sur son lieu de travail. Un jour de télétravail par semaine fait baisser de 20 % les déplacements domicile-travail. Un récent sondage montre que 96% des Belges sont d’accord d’intégrer le télétravail dans leur vie professionnelle.

Nous disposons des outils pour mettre le cap sur une mobilité zéro-émission dès maintenant

Il est désormais temps d’interdire les véhicules thermiques en ville. Les zones de basses émissions se sont avérées être de puissants leviers pour accélérer l’adoption de voitures moins polluantes et ainsi lutter efficacement contre la pollution de l’air. Il a été prouvé, notamment à Londres, Madrid et Paris, que les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) peuvent être rapidement réduites de 30 %. Or, en raison de la crise actuelle, plusieurs ville, notamment Bruxelles, Milan et Londres, ont décidé de suspendre des zones de basses émissions existantes ou de retarder la mise en place de nouvelles zones afin d’aider les professionnels de la santé et les livraisons essentielles. Si de telles décisions sont justifiées du fait de la situation exceptionnelle que nous connaissons, elles ne doivent être que temporaires. Les zones de basses émissions mises entre parenthèses doivent être réactivées dès que possible et devenir, au plus vite, des zones zéro émission. Plusieurs grandes villes européennes ont déjà pris cette direction. Les autres doivent suivre.

Des alternatives aux moteurs à combustion, très polluants, sont désormais disponibles et sont de plus en plus abordables. Les ventes de voitures électriques particulières ont atteint des niveaux sans précédent au cours des premiers mois de 2020, atteignant le chiffre impressionnant de 10 % (contre 3 % il y a seulement quelques mois). Les bus électriques sont également de plus en plus nombreux dans les rues européennes et contribuent à réduire les frais de nos systèmes de mobilité. La crise actuelle est une occasion unique pour les nombreuses villes qui le désirent de bannir les véhicules diesel, essence et gaz de leurs rues.

Le tout est plus que la somme de ses parties

Enfin, si ces stratégies sont associées à des services de partage de véhicules zéro-émission à la demande, nous faisons un pas de plus vers le « paradis du transport ». Transport & Environment a montré l’intérêt de telles combinaisons qui permettent de réduire jusqu’à 60 % la distance parcourue par les voitures en ville. Mais cela signifie également que les véhicules à kilométrage élevé comme les taxis, les voitures roulant pour Uber et Heetch ou encore les véhicules de livraison, devront rapidement se tourner vers la mobilité électrique. Par ailleurs, les nouveaux services qui viendraient s’ajouter à l’offre de la mobilité urbaine doivent compléter, et non remplacer les transports publics, par exemple en proposant des prix plus avantageux sur les services de transport pour certains trajets, comme cela a été mis en place, la nuit, dans la ville de Nice.

Les décisions prises dans les prochaines semaines et les prochains mois peuvent changer nos villes pour le meilleur comme pour le pire. Le confinement nous a donné un aperçu de ce à quoi peuvent ressembler des villes apaisées et saines. Comme le Président Français Emmanuel Macron l’a récemment dit : “Quand nous sortirons de cette crise, les gens ne supporteront plus de respirer un air pollué. Ils diront “Je ne suis pas d’accord avec les choix de sociétés qui m’obligent à respirer un air pollué, où mon bébé attrape une bronchite à cause de cela”.” Nous avons les outils pour éviter un retour de la pollution de l’air. Nous devons les utiliser sans plus attendre.


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Les mouvements citoyens bruxellois réclament des zones résidentielles dans tous les quartiers de Bruxelles

Les mouvements citoyens bruxellois réclament des zones résidentielles dans tous les quartiers de Bruxelles


La crise sanitaire nous oblige à regarder la réalité en face : l’espace pour les piétons et les cyclistes est trop restreint. La répartition disproportionnée de l’espace public en faveur du trafic motorisé est devenue évidente ces jours-ci. Malgré une baisse de trafic de 85%, les rues restent réservées au transport motorisé. Comme si elles en avaient l’exclusivité. De leur côté, les usagers doux doivent se serrer les uns aux autres et ne peuvent souvent pas respecter la distance imposée, surtout dans les quartiers plus densément peuplés de la capitale.

Le sentiment d’urgence – ou le sentiment d’opportunité – a pénétré un groupe toujours plus important de politiciens et nous ne pouvons que nous en réjouir. C’est en effet maintenant que la mobilité post-corona se prépare. Le plan Good Move va diviser la Région bruxelloise en une cinquantaine de mailles où le trafic sera réduit de manière significative. La crise actuelle montre clairement qu’il existe un besoin aigu d’espace public de qualité. Elle a même été citée comme l’une des raisons des récentes émeutes à Anderlecht.

Pour concrétiser cet espace public de qualité, nous proposons de transformer ces mailles apaisées en zones résidentielles sur tout Bruxelles, et ce jusqu’à la fin de l’année au moins. Utilisez le cadre de Good Move pour définir les zones résidentielles : les mailles deviennent des zones résidentielles, sur les axes nous donnons la priorité aux infrastructures cyclables et libérons des voies pour rendre cela possible. A l’intérieur des zones résidentielles, les routes deviennent un espace public partagé qui permet à tous les usagers de se déplacer en respectant la distanciation sociale, que ce soit pour aller au magasin ou au travail ou encore pour prendre l’air au parc. Bruxelles a besoin d’espace pour l’ensemble de ses usagers, aujourd’hui plus que jamais. En pleine crise sanitaire, nous avons besoin de rues et de places où tout le monde peut circuler librement, sans danger, à bonne distance et dans le respect mutuel. Toute personne qui en fait usage effectue en effet un déplacement indispensable. Vienne l’a fait. Or, ce que Vienne peut, Bruxelles le peut certainement aussi ! Une zone résidentielle est prévue dans le Pentagone et à Cureghem, la commune l’expérimente également dans un certain nombre de rues. Nous encourageons ces initiatives, mais nous visons un projet à grande échelle. N’enfermez pas les zones résidentielles, mais reliez-les au plan Good Move.

Nous pouvons instaurer des zones résidentielles dans toute la capitale de manière à créer un fin maillage de voies piétonnes à l’échelle de la ville. Cette démarche permet de ne pas isoler le Bruxellois dans des rues, des placettes ou des parcs. Les personnes confinées sans accès à un jardin ou une terrasse auront ainsi la possibilité de se détendre au grand air, sans être obligées de circuler sur des trottoirs étroits ou de côtoyer de trop près une masse d’autres personnes, toutes en quête du même espace restreint. Les enfants qui n’ont pas d’espace en ce moment auront la possibilité de jouer dehors en toute sécurité.

Cette grande zone résidentielle est cruciale aujourd’hui. Mais nous proposons d’emblée de la maintenir jusqu’à la fin de l’année. Lorsque ce lockdown light sera levé et qu’une partie des voitures reprendront la route, les Bruxellois nécessiteront encore l’espace pour se déplacer sans risque. Les zones résidentielles et les larges pistes cyclables protègent notre santé en évitant de repousser les usagers actifs vers le même espace étroit. En attendant, nombreux Bruxellois découvrent le plaisir de marcher et de faire du vélo en toute liberté et sécurité.

La circulation automobile est maintenue sur une série de grands axes stratégiques, mais nous pouvons aussi préserver les transports en commun dans cette zone. Pour le déploiement et les fonctions spécifiques, nous pouvons nous appuyer sur les connaissances de Good Move, en tant que cadre régional auquel chaque commune peut se raccrocher. Les zones résidentielles sont des instruments que les communes et la police appliquent déjà, elles n’exigent pas de nouveau cadre législatif. Ajoutez des “coupures” et créez des rues à sens unique pour assurer une circulation sûre et fluide et éviter le trafic de transit dans les zones résidentielles. Des contrôles sont évidemment essentiels. S’il y a plus d’espace pour les piétons, la police davantage s’occuper des zones résidentielles et des pistes cyclables.

En tout cas, cette expérience nous apprendra comment rendre les quartiers vivables. Le gouvernement bruxellois vient d’annoncer que la «Ville 30» entrera en vigueur le 1er janvier 2021. Nous pourrons alors reconsidérer où nous voulons revenir à 30 et où les zones résidentielles permanentes sont préférables, conformément au plan Good Move.

Concrètement, nous avançons les propositions suivantes :

  • Transformer les quartiers bruxellois (les mailles) en zones résidentielles où
    • La vitesse des voitures est limitée à 20km/h
    • Piétons, cyclistes et automobilistes se partagent les rues
    • Les enfants ont le droit de jouer
    • La circulation n’est pas bloquée mais freinée
  • Utiliser le cadre de Good Move
    • Définir les mailles comme des zones résidentielles
    • Utiliser les axes prioritairement pour l’infrastructure cycliste en libérant des bandes de circulation
  • Et ce jusque fin 2020, à titre de préparation à l’entrée en vigueur de «Ville 30»
    • Evaluer les zones résidentielles en 2021 et les préserver là où elles sont préférables
    • Conserver les pistes cyclables nouvellement construites le long des grands axes
    • Investir dans les parkings car2bike aux entrées de villes.

Signataires : BRAL, Bruxsel’AIR, Clean Air Brussels, Critical Mass Brussels, Fietsersbond, Filter Café Filtré, GRACQ, Heroes for Zero, Imagine Brabant, Les chercheurs d’air, Picnic the streets, Urban Foxes, Welkom op de Kleine Ring


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